Patte blanche à Euronat

C'est avec la circonspection d'un serpent marchant sur des oeufs que je me suis coulée sur les pas de mon oncle. Tout est parti d'une invitation "no limit" (quand je le sentais quoi) pour un week end au centre Euronat. Pour les novices, ce que j'étais il y a peu, Euronat est un petit paradis vert reservé aux naturistes, dans le noman''land du Medoc, à quelques pas de Lesparre, de Blanquefort et de Montalivet. Loin d'être mon tripe je vous rassure, la preuve: j'avais blindé mon sac de maillots de bains, au cas où mon farceur de tonton aurait dans l'idée de planquer mes bouts de tissus H&M. Il s'agissait, pour l'essentiel, d'une petite visite de courtoisie que j'avais dans l'idée depuis trop longtemps...

Un endroit "bien sous tout rapport" m'avait-il assuré pour arracher mon acceptation,"pas d'animaux bizarres, ni de détraqués, il faut montrer "patte blanche" à l'entrée, d'ailleurs, personne ici ne se regarde: Etre naturiste, c'est une sorte de philosophie".... Soit. De toute façon, les billets étaient déjà pris... Devant un appartement, un touriste étranger s'astreint au dress code local: la feuille de vigne. En ce week end pluvieux, seuls quelques furieux prennent la direction de la plage, écrasant à coup de bottes les pédales de leur velo, le k-way au vent, dans une nudité très explicite...

Temps merdique, rien à craindre donc côté voyeurisme, me voilà rassurée. La première nuit se voudra longue. Il est trois heures du mat' et le sommeil ne veut pas de moi. Pour cause, voilà un long moment que j'entends du bruit dans le jardin. Quelque chose ou quelqu'un gratte desormais la cloison du mobile home dans un râle étouffé. L'imagination s'emballe : un cambrioleur en service trois pièces? Un violeur prêt-à-l'emploi ayant endormis les soupçons des vigiles par son accoutrement édifiant? Un pitt bull certi de blanche pattes (rhaa le roublard)? Munis d'une lampe torche sur la reserve, je tente du haut de ma fenêtre, de scruter le parterre de fleurs afin d'harnacher ces angoisses débiles... intact, à ni rien comprendre.

Le lendemain, ma tante, me rassure, en me pointant du doigt la poubelle éventrée. Un chat, selon toute vraisemblance... Elle me félicite cependant pour mon sang froid siberien. "Tu as pris des risques inconsidérés en ouvrant cette fenêtre. Imagine que tu sois tombés sur un garçon peu recommandable, tu te serais prise un mauvais coup, et moi je serais passée à la casserole!", me lance-t-elle tout-à-trac, plongée dans une rêverie malicieuse. Un frisson me parcourt l'échine... Un psychopathe, voilà un scenario que je n'avais pas eu l'audace d'envisager...